Post by Andrei Tchentchik on Aug 20, 2020 18:35:05 GMT 2
(#485).- Non, les sursauts radio rapides ne viennent pas de civilisations E.T.
Non, les sursauts radio rapides ne viennent pas de civilisations E.T.
Article de Laurent Sacco
Publié le 06/01/2017
Archives
La piste d'une technosignature E.T. semble s'évanouir en ce qui concerne les investigations sur la nature des mystérieux sursauts radio rapides. En localisant l'une des 18 sources connues dans une lointaine galaxie naine, des radioastronomes viennent de rendre cette hypothèse très improbable.
Est-on sur le point de percer le mystère des sursauts radio rapides ? On peut se le demander suite à la publication par un groupe d'astronomes d'un article dans le célèbre journal Nature. Ils y annoncent avoir déterminé pour la première fois la localisation d'un sursaut radio rapide (Fast Radio Burst ou FRB en anglais) observé d'abord en 2012 dans la constellation du Cocher (Auriga en latin) avec le radiotélescope d'Arecibo. La particularité de FRB 121102, qui, comme son nom l'indique, a été détecté le 2 novembre 2012, c'est qu'il s'est produit à plusieurs reprises, ce qui a permis à une batterie d'instruments sur Terre de l'associer à une galaxie naine située à environ 3 milliards d'années-lumière de la Voie lactée. En 2015, les chercheurs pensaient déjà avoir localisé un FRB, celui appelé FRB 150418, mais sa nature de sursaut radio rapide a depuis été remise en question et aujourd'hui, ce sont les observations concernant FRB 121102 qui sont prises au sérieux.
En faisant de la synthèse d'ouverture par interférométrie, il est possible de combiner plusieurs radiotélescopes comme si on en avait un géant de plusieurs dizaines de kilomètres, et même mille fois plus. Ce dessin d'artiste représente ainsi les antennes du VLA, dont les observations à hautes résolutions ont permis de préciser la localisation d'un sursaut radio rapide. © Danielle Futselaar
Rappelons que les FRB ont été repérés pour la première fois en 2007 grâce à de nouvelles analyses d'archives de données collectées par le radiotélescope de Parkes, en Australie. Ils sont aussi appelés « sursauts Lorimer », du nom de leur découvreur. Ils sont extrêmement brefs, quelques millièmes de seconde tout au plus. Mais on estime qu'ils proviennent d'évènements violents qui libèrent, peut-être pendant ce bref laps de temps et dans le domaine radio, autant d'énergie que le Soleil en un jour.
Les astronomes ont du mal à les faire entrer dans le cadre des explications astrophysiques conventionnelles, tout comme ce fut le cas naguère pour les fameux sursauts gamma. C'est pourquoi il est important de déterminer les lieux de leurs occurrences. Sont-ils localisés dans la Voie lactée ou s'agit-il d'objets proprement cosmologiques associés à des phénomènes extragalactiques ? Peut-on les associer à des astres et à d'autres évènements énergétiques dans d'autres longueurs d'ondes, par exemple dans le visible ou dans le domaine des rayons X et gamma ? Ces informations sont vitales pour faire le tri entre plusieurs hypothèses qui vont de la technosignature de civilisations E.T. à celle d'explosion d'étoiles de Planck.
Le télescope Gemini North a finalement permis de débusquer dans le visible la contrepartie du sursaut radio rapide FRB 121102. © Gemini Observatory, AURA, NSF, NRC
Les FRB, des magnétars, des étoiles de Planck ou des AGN ?
En l'occurrence donc, FRB 121102, dont une première localisation approximative avait été obtenue en 2012 s'est manifesté à nouveau à neuf reprises au cours des 83 heures d'observations qui lui ont été consacrées pendant 6 mois avec du temps alloué aux radioastronomes pour le fameux Very Large Array (VLA) et ses 27 antennes au Nouveau-Mexique. C'est grâce à leur combinaison que la résolution des observations a pu augmenter et que le mystère de la localisation d'au moins un FRB a pu être en partie percé. En effet, par la même occasion, les chercheurs ont été en mesure de savoir où pointer exactement sur la voûte céleste, le télescope de 8 m Gemini North au sommet du Mauna Kea à Hawaï.
Une petite galaxie contenant tout au plus 1 % de la masse de notre Voie lactée est alors apparue et on a pu avoir accès à une mesure de décalage spectral, donc de distance. FRB 121102 est donc un objet extragalactique, ce qui au moins dans ce cas précis, ne s'accorde pas facilement avec l'hypothèse qu'il puisse s'agir d'une technosignature E.T. puisqu'on la supposait, pour être crédible, étant donnée l'énergie libérée, avec une source dans notre Galaxie.
En affinant l'étude de la galaxie contenant le FRB, les astronomes ont pu le localiser dans une région d'une centaine d'années-lumière de diamètre. La galaxie apparait aussi comme une source radio continue bien particulière, ce qui laisse en fait penser qu'elle possède un noyau actif (AGN) dont l'activité provient de la matière tombant sur un trou noir supermassif. FRB 121102 pourrait provenir d'un événement associé à ce noyau actif, ce que suggère le fait qu'il semble situé dans une région de 100 années-lumière de diamètre entourant le cœur de la galaxie naine. Or on sait que des trous noirs supermassifs peuvent générer des jets de matière qui deviennent des sources d'ondes radio.
Mais parmi les autres hypothèses avancées, il y a celle d'un magnétar qui reste toujours en lice. Les ondes radio pourraient là aussi provenir de l'instabilité de l'accrétion de matière par ce type d'étoile à neutrons possédant un champ magnétique particulièrement intense. Mais selon l'astrophysicien Jason Hessel, il faudrait faire intervenir un magnétar atypique, d'un genre encore jamais détecté parmi ceux que l'on connait dans la Voie lactée. Des observations dans le domaine des rayons X ou gamma pourront peut-être nous permettre d'y voir plus clair dans le futur.
Ce qui est certain, au moins dans le cas de FRB 121102, est que ce qui cause un sursaut radio rapide n'est pas détruit par le processus d'émission, ce qui ne s'accorde pas avec l'idée que ce pourrait être une supernova ou un sursaut gamma long et peut-être pas non plus avec une étoile de Planck.
F I N .
Non, les sursauts radio rapides ne viennent pas de civilisations E.T.
Article de Laurent Sacco
Publié le 06/01/2017
Archives
La piste d'une technosignature E.T. semble s'évanouir en ce qui concerne les investigations sur la nature des mystérieux sursauts radio rapides. En localisant l'une des 18 sources connues dans une lointaine galaxie naine, des radioastronomes viennent de rendre cette hypothèse très improbable.
Est-on sur le point de percer le mystère des sursauts radio rapides ? On peut se le demander suite à la publication par un groupe d'astronomes d'un article dans le célèbre journal Nature. Ils y annoncent avoir déterminé pour la première fois la localisation d'un sursaut radio rapide (Fast Radio Burst ou FRB en anglais) observé d'abord en 2012 dans la constellation du Cocher (Auriga en latin) avec le radiotélescope d'Arecibo. La particularité de FRB 121102, qui, comme son nom l'indique, a été détecté le 2 novembre 2012, c'est qu'il s'est produit à plusieurs reprises, ce qui a permis à une batterie d'instruments sur Terre de l'associer à une galaxie naine située à environ 3 milliards d'années-lumière de la Voie lactée. En 2015, les chercheurs pensaient déjà avoir localisé un FRB, celui appelé FRB 150418, mais sa nature de sursaut radio rapide a depuis été remise en question et aujourd'hui, ce sont les observations concernant FRB 121102 qui sont prises au sérieux.
En faisant de la synthèse d'ouverture par interférométrie, il est possible de combiner plusieurs radiotélescopes comme si on en avait un géant de plusieurs dizaines de kilomètres, et même mille fois plus. Ce dessin d'artiste représente ainsi les antennes du VLA, dont les observations à hautes résolutions ont permis de préciser la localisation d'un sursaut radio rapide. © Danielle Futselaar
Rappelons que les FRB ont été repérés pour la première fois en 2007 grâce à de nouvelles analyses d'archives de données collectées par le radiotélescope de Parkes, en Australie. Ils sont aussi appelés « sursauts Lorimer », du nom de leur découvreur. Ils sont extrêmement brefs, quelques millièmes de seconde tout au plus. Mais on estime qu'ils proviennent d'évènements violents qui libèrent, peut-être pendant ce bref laps de temps et dans le domaine radio, autant d'énergie que le Soleil en un jour.
Les astronomes ont du mal à les faire entrer dans le cadre des explications astrophysiques conventionnelles, tout comme ce fut le cas naguère pour les fameux sursauts gamma. C'est pourquoi il est important de déterminer les lieux de leurs occurrences. Sont-ils localisés dans la Voie lactée ou s'agit-il d'objets proprement cosmologiques associés à des phénomènes extragalactiques ? Peut-on les associer à des astres et à d'autres évènements énergétiques dans d'autres longueurs d'ondes, par exemple dans le visible ou dans le domaine des rayons X et gamma ? Ces informations sont vitales pour faire le tri entre plusieurs hypothèses qui vont de la technosignature de civilisations E.T. à celle d'explosion d'étoiles de Planck.
Le télescope Gemini North a finalement permis de débusquer dans le visible la contrepartie du sursaut radio rapide FRB 121102. © Gemini Observatory, AURA, NSF, NRC
Les FRB, des magnétars, des étoiles de Planck ou des AGN ?
En l'occurrence donc, FRB 121102, dont une première localisation approximative avait été obtenue en 2012 s'est manifesté à nouveau à neuf reprises au cours des 83 heures d'observations qui lui ont été consacrées pendant 6 mois avec du temps alloué aux radioastronomes pour le fameux Very Large Array (VLA) et ses 27 antennes au Nouveau-Mexique. C'est grâce à leur combinaison que la résolution des observations a pu augmenter et que le mystère de la localisation d'au moins un FRB a pu être en partie percé. En effet, par la même occasion, les chercheurs ont été en mesure de savoir où pointer exactement sur la voûte céleste, le télescope de 8 m Gemini North au sommet du Mauna Kea à Hawaï.
Une petite galaxie contenant tout au plus 1 % de la masse de notre Voie lactée est alors apparue et on a pu avoir accès à une mesure de décalage spectral, donc de distance. FRB 121102 est donc un objet extragalactique, ce qui au moins dans ce cas précis, ne s'accorde pas facilement avec l'hypothèse qu'il puisse s'agir d'une technosignature E.T. puisqu'on la supposait, pour être crédible, étant donnée l'énergie libérée, avec une source dans notre Galaxie.
En affinant l'étude de la galaxie contenant le FRB, les astronomes ont pu le localiser dans une région d'une centaine d'années-lumière de diamètre. La galaxie apparait aussi comme une source radio continue bien particulière, ce qui laisse en fait penser qu'elle possède un noyau actif (AGN) dont l'activité provient de la matière tombant sur un trou noir supermassif. FRB 121102 pourrait provenir d'un événement associé à ce noyau actif, ce que suggère le fait qu'il semble situé dans une région de 100 années-lumière de diamètre entourant le cœur de la galaxie naine. Or on sait que des trous noirs supermassifs peuvent générer des jets de matière qui deviennent des sources d'ondes radio.
Mais parmi les autres hypothèses avancées, il y a celle d'un magnétar qui reste toujours en lice. Les ondes radio pourraient là aussi provenir de l'instabilité de l'accrétion de matière par ce type d'étoile à neutrons possédant un champ magnétique particulièrement intense. Mais selon l'astrophysicien Jason Hessel, il faudrait faire intervenir un magnétar atypique, d'un genre encore jamais détecté parmi ceux que l'on connait dans la Voie lactée. Des observations dans le domaine des rayons X ou gamma pourront peut-être nous permettre d'y voir plus clair dans le futur.
Ce qui est certain, au moins dans le cas de FRB 121102, est que ce qui cause un sursaut radio rapide n'est pas détruit par le processus d'émission, ce qui ne s'accorde pas avec l'idée que ce pourrait être une supernova ou un sursaut gamma long et peut-être pas non plus avec une étoile de Planck.
F I N .