Post by Andrei Tchentchik on Jun 17, 2019 11:14:56 GMT 2
(#199).- Les satellites d’Elon Musk forment un train d’étoiles, du jamais vu.
Les satellites d’Elon Musk forment un «train d’étoiles» défilant dans le ciel, du jamais vu.
Par Tristan Vey – Mis à jour le 31/05/2019 à 22:17
Les 60 premiers satellites de Starlink forment un train défilant dans le ciel. Movie Vertigo-Youtube.
Le spectacle, digne d’un film de SF, est saisissant. Quelques astronomes s’en sont émus en début de semaine, craignant que cela devienne une menace pour le ciel étoilé.
Les 60 premiers satellites du projet de mégaconstellation Starlink de l’entreprise SpaceX, déployés samedi dernier, ont offert cette semaine un spectacle à la fois grandiose, digne d’un film de science-fiction, et inquiétant. Cette grappe de petits satellites largués à 440 km d’altitude s’est avérée si brillante qu’elle est parfois visible à l’œil nu. On peut ainsi distinguer un train d’étoiles défilant dans le ciel (en cliquant sur le bouton «track it» sur cette page, vous pouvez voir la position de chacun des satellites à un instant donné et sa trajectoire). Du jamais vu dans l’histoire de l’astronomie, tout simplement. Les deux vidéos ci-dessous prises respectivement le 26 mai à 23h26, puis deux heures plus tard, à 1h03, en Grande-Bretagne, sont peut-être les plus incroyables:
VIDÉO YouTube : SpaceX Starlink satellite...
DURÉE : 1m13s.
La surprise passée, un vent de panique a commencé à souffler. Si les 12.000 engins de cette mégaconstellation destinée à prodiguer de l’internet partout dans le monde sont effectivement mis sur orbite (ce qui est encore loin d’être évident), le ciel étoilé serait-il menacé? Rappelons que même dans un ciel très épargné par la pollution lumineuse, on ne distingue jamais plus de quelques milliers d’étoiles..
Différents astronomes ou astrophysiciens s’en sont émus sur Twitter, comme Alex Parker ou Jonathan McDowell. Une image notamment a circulé, mettant la communauté en émoi. On y voit les traînées lumineuses laissées par leur passage sur un cliché pris par le télescope de l’Observatoire Lowell situé dans l’Arizona alors qu’il tente d’observer la galaxie NGC 5353/4:
Lowell Observatory
Tout cela a effectivement de quoi faire peur. Le ballet des satellites de Starlink représenterait indéniablement un problème s’ils étaient tous aussi visibles... Mais différents éléments doivent être pris en compte. Pour commencer, les satellites ne sont pas encore sur leur orbite définitive, qui sera plus élevée de 100 km au moins. À terme, ils seront deux fois moins brillants et bien plus éloignés les uns des autres. Cela supprimera cet effet de groupe si saisissant. La constellation complète s’étalera enfin jusqu’à 1200 km, à des altitudes où la plupart ne seront pas visibles. Elon Musk a d’autre part promis qu’il allait voir avec ses ingénieurs s’il était possible de réduire la quantité de lumière réfléchie par ses engins (ce qu’on appelle l’albédo) pour limiter la potentielle pollution lumineuse. À terme, peu de satellites Satrlink seront donc visibles à l’œil nu.
Les astronomes amateurs ne semblent d’ailleurs pas plus inquiets que cela. «Nous ne faisons plus de poses très longues», explique Frédéric Tapissier, président de l’association Astronomie du Vexin (AVEX). «Nous découpons les nuits en une succession de poses courtes que nous additionnons ensuite avec des logiciels, ce qui nous permet d’éliminer les photos sur lesquelles passent les satellites.» Le problème n’est en effet pas complètement nouveau et des milliers d’objets sont déjà en orbite autour de nous. Lorsque vous voyez une étoile qui bouge dans le ciel, c’est généralement un satellite! Il y en a un par minute environ dans le ciel. Le plus lumineux est sans aucun doute la Station spatiale internationale. «Je ne pense pas que les mégaconstellations nous poseront un problème particulier pour prendre de belles images», souligne Frédéric Tapissier.
Vendredi soir, SpaceX a indiqué que les 60 premiers satellites de sa constellation d’internet à haut-débit Starlink fonctionnaient bien et seraient moins visibles depuis la Terre quand ils auront atteint leur orbite finale. Dans son communiqué, SpaceX annonce que «les 60 satellites ont déployé leurs panneaux solaires avec succès, ont généré de l’énergie et communiqué avec les stations au sol». «Egalement, merci de noter que l’observabilité (sic) des satellites Starlink est spectaculairement réduite au fur et à mesure qu’ils montent leur orbite à une distance plus grande et s’orientent avec leurs antennes (...) tournées vers la Terre et leurs panneaux solaires à l’arrière du corps du satellite», a ajouté la société.
Le ciel étoile menacé par l’éclairage
Quant aux astronomes professionnels, ils travaillent sur des zones de ciel extrêmement réduites. «Les chances pour qu’un satellite passe précisément sur l’objet étudié sont presque nulles», analyse Jean-Eudes Arlot, astronome à l’Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides. «Quant aux relevés de ciel un peu plus systématiques qui sont faits, ils ne devraient pas avoir beaucoup de mal à ignorer ces signaux parasites qui ne ressemblent pas du tout aux objets recherchés. Je ne crois pas qu’il y ait lieu de s’inquiéter.»
Les deux passionnés soulignent tous les deux que la principale menace pour le ciel étoilé reste encore et toujours la pollution lumineuse venue du sol. Dans les grandes villes comme Paris, il est généralement impossible de voir plus d’une dizaine d’étoiles dans les meilleurs cas. Quant à voir la Voie lactée, par exemple, il faut vraiment se trouver dans des zones reculées pour parvenir encore à la discerner. Une bien triste réalité.
F I N .
Les satellites d’Elon Musk forment un «train d’étoiles» défilant dans le ciel, du jamais vu.
Par Tristan Vey – Mis à jour le 31/05/2019 à 22:17
Les 60 premiers satellites de Starlink forment un train défilant dans le ciel. Movie Vertigo-Youtube.
Le spectacle, digne d’un film de SF, est saisissant. Quelques astronomes s’en sont émus en début de semaine, craignant que cela devienne une menace pour le ciel étoilé.
Les 60 premiers satellites du projet de mégaconstellation Starlink de l’entreprise SpaceX, déployés samedi dernier, ont offert cette semaine un spectacle à la fois grandiose, digne d’un film de science-fiction, et inquiétant. Cette grappe de petits satellites largués à 440 km d’altitude s’est avérée si brillante qu’elle est parfois visible à l’œil nu. On peut ainsi distinguer un train d’étoiles défilant dans le ciel (en cliquant sur le bouton «track it» sur cette page, vous pouvez voir la position de chacun des satellites à un instant donné et sa trajectoire). Du jamais vu dans l’histoire de l’astronomie, tout simplement. Les deux vidéos ci-dessous prises respectivement le 26 mai à 23h26, puis deux heures plus tard, à 1h03, en Grande-Bretagne, sont peut-être les plus incroyables:
VIDÉO YouTube : SpaceX Starlink satellite...
DURÉE : 1m13s.
La surprise passée, un vent de panique a commencé à souffler. Si les 12.000 engins de cette mégaconstellation destinée à prodiguer de l’internet partout dans le monde sont effectivement mis sur orbite (ce qui est encore loin d’être évident), le ciel étoilé serait-il menacé? Rappelons que même dans un ciel très épargné par la pollution lumineuse, on ne distingue jamais plus de quelques milliers d’étoiles..
Différents astronomes ou astrophysiciens s’en sont émus sur Twitter, comme Alex Parker ou Jonathan McDowell. Une image notamment a circulé, mettant la communauté en émoi. On y voit les traînées lumineuses laissées par leur passage sur un cliché pris par le télescope de l’Observatoire Lowell situé dans l’Arizona alors qu’il tente d’observer la galaxie NGC 5353/4:
Lowell Observatory
Tout cela a effectivement de quoi faire peur. Le ballet des satellites de Starlink représenterait indéniablement un problème s’ils étaient tous aussi visibles... Mais différents éléments doivent être pris en compte. Pour commencer, les satellites ne sont pas encore sur leur orbite définitive, qui sera plus élevée de 100 km au moins. À terme, ils seront deux fois moins brillants et bien plus éloignés les uns des autres. Cela supprimera cet effet de groupe si saisissant. La constellation complète s’étalera enfin jusqu’à 1200 km, à des altitudes où la plupart ne seront pas visibles. Elon Musk a d’autre part promis qu’il allait voir avec ses ingénieurs s’il était possible de réduire la quantité de lumière réfléchie par ses engins (ce qu’on appelle l’albédo) pour limiter la potentielle pollution lumineuse. À terme, peu de satellites Satrlink seront donc visibles à l’œil nu.
Les astronomes amateurs ne semblent d’ailleurs pas plus inquiets que cela. «Nous ne faisons plus de poses très longues», explique Frédéric Tapissier, président de l’association Astronomie du Vexin (AVEX). «Nous découpons les nuits en une succession de poses courtes que nous additionnons ensuite avec des logiciels, ce qui nous permet d’éliminer les photos sur lesquelles passent les satellites.» Le problème n’est en effet pas complètement nouveau et des milliers d’objets sont déjà en orbite autour de nous. Lorsque vous voyez une étoile qui bouge dans le ciel, c’est généralement un satellite! Il y en a un par minute environ dans le ciel. Le plus lumineux est sans aucun doute la Station spatiale internationale. «Je ne pense pas que les mégaconstellations nous poseront un problème particulier pour prendre de belles images», souligne Frédéric Tapissier.
Vendredi soir, SpaceX a indiqué que les 60 premiers satellites de sa constellation d’internet à haut-débit Starlink fonctionnaient bien et seraient moins visibles depuis la Terre quand ils auront atteint leur orbite finale. Dans son communiqué, SpaceX annonce que «les 60 satellites ont déployé leurs panneaux solaires avec succès, ont généré de l’énergie et communiqué avec les stations au sol». «Egalement, merci de noter que l’observabilité (sic) des satellites Starlink est spectaculairement réduite au fur et à mesure qu’ils montent leur orbite à une distance plus grande et s’orientent avec leurs antennes (...) tournées vers la Terre et leurs panneaux solaires à l’arrière du corps du satellite», a ajouté la société.
Le ciel étoile menacé par l’éclairage
Quant aux astronomes professionnels, ils travaillent sur des zones de ciel extrêmement réduites. «Les chances pour qu’un satellite passe précisément sur l’objet étudié sont presque nulles», analyse Jean-Eudes Arlot, astronome à l’Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides. «Quant aux relevés de ciel un peu plus systématiques qui sont faits, ils ne devraient pas avoir beaucoup de mal à ignorer ces signaux parasites qui ne ressemblent pas du tout aux objets recherchés. Je ne crois pas qu’il y ait lieu de s’inquiéter.»
Les deux passionnés soulignent tous les deux que la principale menace pour le ciel étoilé reste encore et toujours la pollution lumineuse venue du sol. Dans les grandes villes comme Paris, il est généralement impossible de voir plus d’une dizaine d’étoiles dans les meilleurs cas. Quant à voir la Voie lactée, par exemple, il faut vraiment se trouver dans des zones reculées pour parvenir encore à la discerner. Une bien triste réalité.
F I N .