Post by Andrei Tchentchik on Jun 24, 2019 16:13:59 GMT 2
(#216).- On ne connaît toujours pas la masse exacte de notre galaxie.
On ne connaît toujours pas la masse exacte de notre galaxie.
Par Tristan Vey – Mis à jour le 15/03/2019 à 09:38
Vue d'artiste de notre galaxie et des amas globulaires qui gravitent autour d'elle. NASA, ESA, and A. Feild (STScI)
Combien pèse exactement la Voie lactée? De nombreuses études sont menées pour déterminer la masse de notre galaxie, mais les estimations restent encore très variables.
La nouvelle a fait le tour du monde ce week-end: nous aurions enfin une idée précise de la masse de notre galaxie, la Voie lactée. D'après une étude parue dans The Astrophysical Journal, elle pèserait très exactement 1500 milliards de fois la masse de notre Soleil, quand les précédentes estimations oscillaient entre 500 et 3000 milliards de masses solaires, ajoute le communiqué de presse publié à cette occasion par le site du télescope spatial américano-européen Hubble. Ce que ce document ne dit pas, en revanche, c'est que ce nouveau résultat est encore entaché d'une grande incertitude. La masse de notre galaxie serait en fait comprise entre 1100 et 2300 masses solaires.
S'il n'est pas totalement sans intérêt, ce résultat n'est donc pas aussi concluant qu'annoncé. Il illustre en fait plutôt bien la difficulté qu'il peut y avoir en astronomie à peser des objets. Les galaxies en particulier sont majoritairement constituées de «matière noire», une substance mystérieuse et parfaitement invisible dont on ne sait à peu près rien si ce n'est qu'elle ne se manifeste que par l'influence gravitationnelle qu'elle exerce sur son environnement. Elle est donc assez difficile à quantifier...
«Nous avons une assez bonne idée de la quantité de matière classique, majoritairement les étoiles, que l'on retrouve dans la Voie lactée», détaille Françoise Combes, astrophysicienne à l'Observatoire de Paris. «Cela représente 40 à 50 milliards de masses solaires. Mais il y a des dizaines de fois plus de matière noire a priori. Toute la question est de savoir précisément combien.»
Prenons la dernière étude en date, évoquée au début de cet article. Les chercheurs du Space Telescope Science Institute, fondé historiquement par la Nasa pour diriger les recherches faites à l'aide du télescope spatial Hubble, ont mis en commun leurs données avec celles du satellite européen Gaia, qui a effectué le relevé du ciel le plus complet à ce jour. Ils se sont penchés sur la manière exacte dont des amas globulaires, des groupements de quelques centaines de milliers d'étoiles, gravitent autour de la Voie lactée (qui contient, elle, 200 milliards d'étoiles environ, à titre de comparaison).
«Plus une galaxie est massive, plus ces amas se déplacent vite sous l'action de la gravité», résume Wyn Evans, de l'université de Cambridge, qui cosigne ces travaux. «La plupart des mesures précédentes ne regardaient que la vitesse à laquelle ces amas s'approchaient ou reculaient par rapport à nous. Nous avons réussi à mesurer également leur mouvement latéral, et donc leur vitesse propre réelle.» Ce qui leur a permis d'affiner un peu la détermination de la masse.
Si ces travaux sont tout à fait sérieux, ils ne reposent toutefois toujours que sur une quarantaine d'amas dont les plus lointains sont situés à 130.000 années-lumière. Or la matière noire qui compose notre galaxie s'étend bien au-delà, sur plus de 600.000 années-lumière. «Il faut donc extrapoler les résultats obtenus sur un volume bien plus grand», explique Benoît Famaey, spécialiste de la dynamique des galaxies à l'Observatoire astronomique de Strasbourg. Ce qui induit une grande incertitude sur le résultat final. Sans compter que les chercheurs font l'hypothèse que le «halo» de matière noire au sein duquel nous nous trouvons est sphérique, ce qui n'est pas du tout certain.
«Avec la publication de la 2e fournée de données de Gaia, les études se sont multipliées sur le sujet ces derniers mois, avec des méthodes et des modèles de calcul différents», précise Benoît Famaey. «Les résultats sont assez variés et comportent tous des marges d'erreur intrinsèques importantes. J'ai moi-même travaillé sur ce sujet avec des collègues en Allemagne en utilisant une méthode très différente de celle présentée ici et abouti à peu près au même résultat. Mais cela ne veut pas dire que nous ayons raison tant il y a de disparités entre les résultats des différentes études.»
Pourquoi vouloir mesurer à tout prix la masse de notre galaxie? Par simple curiosité, déjà. C'est notre environnement immédiat. Mais il existe aussi des raisons plus profondes. Si notre galaxie est aussi massive que toutes ces estimations le laissent penser, alors il devrait y avoir des milliers de galaxies satellites. «Nous n'en connaissons que quelques dizaines», ajoute Françoise Combes. «II y a là quelque chose que nous ne comprenons pas. Peut-être existe-t-il des galaxies de pure matière noire, sans étoiles? Ou peut-être que nous nous trompons complètement sur la masse de notre galaxie?» Resterait dans ce cas à comprendre pourquoi…
F I N .
On ne connaît toujours pas la masse exacte de notre galaxie.
Par Tristan Vey – Mis à jour le 15/03/2019 à 09:38
Vue d'artiste de notre galaxie et des amas globulaires qui gravitent autour d'elle. NASA, ESA, and A. Feild (STScI)
Combien pèse exactement la Voie lactée? De nombreuses études sont menées pour déterminer la masse de notre galaxie, mais les estimations restent encore très variables.
La nouvelle a fait le tour du monde ce week-end: nous aurions enfin une idée précise de la masse de notre galaxie, la Voie lactée. D'après une étude parue dans The Astrophysical Journal, elle pèserait très exactement 1500 milliards de fois la masse de notre Soleil, quand les précédentes estimations oscillaient entre 500 et 3000 milliards de masses solaires, ajoute le communiqué de presse publié à cette occasion par le site du télescope spatial américano-européen Hubble. Ce que ce document ne dit pas, en revanche, c'est que ce nouveau résultat est encore entaché d'une grande incertitude. La masse de notre galaxie serait en fait comprise entre 1100 et 2300 masses solaires.
S'il n'est pas totalement sans intérêt, ce résultat n'est donc pas aussi concluant qu'annoncé. Il illustre en fait plutôt bien la difficulté qu'il peut y avoir en astronomie à peser des objets. Les galaxies en particulier sont majoritairement constituées de «matière noire», une substance mystérieuse et parfaitement invisible dont on ne sait à peu près rien si ce n'est qu'elle ne se manifeste que par l'influence gravitationnelle qu'elle exerce sur son environnement. Elle est donc assez difficile à quantifier...
«Nous avons une assez bonne idée de la quantité de matière classique, majoritairement les étoiles, que l'on retrouve dans la Voie lactée», détaille Françoise Combes, astrophysicienne à l'Observatoire de Paris. «Cela représente 40 à 50 milliards de masses solaires. Mais il y a des dizaines de fois plus de matière noire a priori. Toute la question est de savoir précisément combien.»
Prenons la dernière étude en date, évoquée au début de cet article. Les chercheurs du Space Telescope Science Institute, fondé historiquement par la Nasa pour diriger les recherches faites à l'aide du télescope spatial Hubble, ont mis en commun leurs données avec celles du satellite européen Gaia, qui a effectué le relevé du ciel le plus complet à ce jour. Ils se sont penchés sur la manière exacte dont des amas globulaires, des groupements de quelques centaines de milliers d'étoiles, gravitent autour de la Voie lactée (qui contient, elle, 200 milliards d'étoiles environ, à titre de comparaison).
«Plus une galaxie est massive, plus ces amas se déplacent vite sous l'action de la gravité», résume Wyn Evans, de l'université de Cambridge, qui cosigne ces travaux. «La plupart des mesures précédentes ne regardaient que la vitesse à laquelle ces amas s'approchaient ou reculaient par rapport à nous. Nous avons réussi à mesurer également leur mouvement latéral, et donc leur vitesse propre réelle.» Ce qui leur a permis d'affiner un peu la détermination de la masse.
Si ces travaux sont tout à fait sérieux, ils ne reposent toutefois toujours que sur une quarantaine d'amas dont les plus lointains sont situés à 130.000 années-lumière. Or la matière noire qui compose notre galaxie s'étend bien au-delà, sur plus de 600.000 années-lumière. «Il faut donc extrapoler les résultats obtenus sur un volume bien plus grand», explique Benoît Famaey, spécialiste de la dynamique des galaxies à l'Observatoire astronomique de Strasbourg. Ce qui induit une grande incertitude sur le résultat final. Sans compter que les chercheurs font l'hypothèse que le «halo» de matière noire au sein duquel nous nous trouvons est sphérique, ce qui n'est pas du tout certain.
«Avec la publication de la 2e fournée de données de Gaia, les études se sont multipliées sur le sujet ces derniers mois, avec des méthodes et des modèles de calcul différents», précise Benoît Famaey. «Les résultats sont assez variés et comportent tous des marges d'erreur intrinsèques importantes. J'ai moi-même travaillé sur ce sujet avec des collègues en Allemagne en utilisant une méthode très différente de celle présentée ici et abouti à peu près au même résultat. Mais cela ne veut pas dire que nous ayons raison tant il y a de disparités entre les résultats des différentes études.»
Pourquoi vouloir mesurer à tout prix la masse de notre galaxie? Par simple curiosité, déjà. C'est notre environnement immédiat. Mais il existe aussi des raisons plus profondes. Si notre galaxie est aussi massive que toutes ces estimations le laissent penser, alors il devrait y avoir des milliers de galaxies satellites. «Nous n'en connaissons que quelques dizaines», ajoute Françoise Combes. «II y a là quelque chose que nous ne comprenons pas. Peut-être existe-t-il des galaxies de pure matière noire, sans étoiles? Ou peut-être que nous nous trompons complètement sur la masse de notre galaxie?» Resterait dans ce cas à comprendre pourquoi…
F I N .